Aujourd'hui, une nouvelle amie Facebook m'a demandé ce que je pensais de la position biblique sur le port des bijoux. Dans le
même temps, un soi-disant "frère" me traitait d'ange déchu dans un commentaire laissé sur mon blog en réaction à quelques questions posées sur les étrangetés du récit génésiaque de la
création.
Je dédie à tous deux cet article publié il y a quelques années par une commission d'éthique qui avait été mise en place par
l'Union Franco-belge des adventites du 7ème jour, en le reproduisant dans son intégralité et en attirant particulièrement l'attention du lecteur sur sur l'introduction de ce document.
"UFB - Commission
d'éthique
Port de bijoux
Approche
méthodologique
d'herméneutique biblique.
L'Eglise adventiste est l'une des héritières d'une tradition
remontant au courant radical de la Réforme, celui des
anabaptistes, concernant l'abstention de bijoux. Les prédications, les
articles et exposés qu'elle a produits sur ce sujet, sont en général des tentatives de
justification de cette tradition.
Ce genre de démarche
induit une méthodologie qui comporte deux grands risques :
I -
Celui de sélectionner dans
l'information disponible uniquement ce qui va dans le sens de l'idée à
défendre. Or, la première règle d'honnêteté et donc d'herméneutique consiste à examiner
l'ensemble des données susceptibles d'entrer dans le champ de la recherche.
2. - Celui de se contenter de la lettre d'un texte sans
chercher à comprendre ses
intentions,
et de vouloir faire appliquer cette lettre indépendamment des circonstances
particulières. Or, aucun texte biblique n'a été rédigé indépendamment de circonstances précises. Il est donc indispensable d'étudier le contexte littéraire et historique de chaque
texte à verser au dossier, avant d'en dégager des principes pouvant servir à appliquer le texte dans des circonstances autres.
II est grand temps de produire une
étude
méthodique sur ce sujet qui, dans nos milieux,
agite les esprits.
A. Les données de l'Ancien
Testament 1. Genèse
2.10-14
Le texte dit : ...le pays
d'Havila où se trouve l'or - et
l'or de ce pays est bon - ainsi que le bdellium et la
pierre d'onyx.
Le contexte littéraire nous situe dans
la description du jardin d'Eden créé par Dieu pour nos premiers parents. Cet élément de
description, comme les autres, a pour objectif de montrer au lecteur la beauté et la richesse du paradis originel.
Le contexte historique est délicat : le texte a forcément été écrit
longtemps après la création, et même longtemps après le déluge. Il fait allusions à une géographie postdiluvienne (en mentionnant le Tigre et l'Euphrate,
ainsi que l'Arabie, la Nubie ou une partie de Madian). Il est en tout cas le reflet d'une pensée qui veut exalter Dieu pour sa création et qui
considère un métal précieux, l'or, une gomme odoriférante, le bdellium, et une pierre précieuse, l'onyx, comme de belles et bonnes choses. Ces
trois matériaux étaient-ils
utilisés à l'époque de la rédaction du texte comme matériaux de bijouterie et de
cosmétique? Très certainement. On ne connaît aucune époque et aucune civilisation où
ce n'est pas le cas.
Ce texte approuve l'utilisation de l'or par l'homme.
2. Genèse 13.2;
24.35
Le texte dit : Abram était très riche en
troupeaux, en argent et en or. C'est le Seigneur qui lui a donné ces
richesses.
Le contexte littéraire indique
qu'Abram a été appelé par Dieu et a accepté cette vocation. Malgré son
erreur, Dieu intervient pour le protéger en Egypte. Sa richesse et celle de son neveu
Loth, vont les conduire à se séparer.
Le contexte historique nous apprend que l'argent servait de
monnaie d'échange dans
les
transactions commerciales (23.16 : Abraham achète le champ et la caverne de Macpela pour 400 sicles d'argent), que l'or
servait à la fabrication de bijoux, qu'Abraham possédait des bijoux en or et qu'il n'était pas contre leur port puisqu'il en offrait (24.22 : Eliézer offre à Rébecca 1 anneau d'or pesant 1/2 sicle, et 2 bracelets d'or pesant chacun 10 sicles; 24.30
: Rébecca les porte puisque son frère les voit; Eliézer lui-même a mis les bijoux qu'il offrait de la part d'Abraham, l'anneau au nez
de Rébecca et les bracelets à ses poignets). L'argent et l'or servaient à confectionner des objets riches qui
pouvaient servir de cadeaux (24.53 : Eliézer offre des objets d'argent, des objets d'or, des vêtements à Rébecca, et d'autres objets riches à son frère et à sa mère).
Ce texte approuve l'utilisation de l'or et de l'argent pour
fabriquer des bijoux, la possession, l'offrande, la
réception et le port
des bijoux.
3.
Genèse
35.1-4
Le texte dit : Ils
livrèrent à Jacob les dieux
de l'étranger qu'ils avaient en main et les anneaux qu'ils portaient aux oreilles : Jacob les enfouit sous le térébinthe près de Sichem.
Le contexte littéraire nous apprend que
Siméon et Lévi viennent de massacrer les hommes de Sichem, et de
piller la ville (34.28,29 : ils ont pris les femmes, les enfants, les troupeaux, et les
richesses) pour venger leur sœur Dina qui avait été violée par le fils du roi de cette ville). Jacob a peur. Dieu lui parle, lui dit de partir pour Béthel. Jacob doit y élever un
autel. Obéissant à cet ordre divin, Jacob prépare les siens à partir pour ce
pèlerinage religieux. Il demande à tous les siens de se débarrasser de tous les dieux
étrangers qui sont au milieu du clan, de se purifier et de changer de vêtements (35.2). Le verset 4 indique l'application de cet ordre de Jacob par les membres de son
clan.
Le contexte historique nous apprend que les
peuples mésopotamiens
et cananéens
de l'époque fabriquaient
des statuettes pour représenter les divinités qu'ils adoraient. Nous ne savons pas
exactement comment étaient les anneaux que ces gens portaient aux oreilles, ni dans
quels matériaux ils étaient faits, ni s'ils avaient une relation particulière avec les
cultes liés à ces statuettes.
Le fait qu'aucun autre type de bijoux ne soit
mentionné (colliers,
bracelets, bagues, anneaux portés au
nez), et que la préoccupation de Jacob est essentiellement d'ordre religieux, incite à
penser que Jacob a demandé aux siens de se dépouiller des anneaux qu'ils avaient
aux oreilles non pas parce que c'étaient des bijoux éléments de parures, mais parce
qu'ils avaient un lien avec un culte concurrent de celui de Dieu.
Ce texte peut être valablement
utilisé pour combattre le port de bijoux qui ont une signification
religieuse opposée au culte du vrai Dieu. Il peut éventuellement être utilisé comme une mise en garde contre le risque d'idolâtrer des objets, y compris des bijoux, plutôt que d'adorer
le seul vrai Dieu. Il ne peut pas être utilisé pour interdire de façon générale le port de
bijoux.
4. Genèse
38.18,25
Le texte dit : ton sceau, ton cordon (tes cordons) et le bâton
que tu as à la main.
Le contexte littéraire fait de ces
objets appartenant à Juda, des gages. Ces objets permettent
d'identifier leur propriétaire, et représentent sans doute une certaine valeur marchande.
Le contexte historique nous permet de dire que le sceau
devait être en métal. Il
se peut que le ou les
cordons servaient à mettre ce sceau autour du cou ou du poignet. Quant au bâton,
certains pensent qu'il s'agissait d'un bâton sculpté, ancêtre du sceptre royal, démontrant une certaine autorité. Il
est certain que ces objets avaient en plus de leur valeur d'identification de leur propriétaire une valeur esthétique. C'étaient en quelque sorte des bijoux
masculins à valeur utilitaire.
Rien dans ce texte ne permet de déduire une quelconque
désapprobation de l'utilisation de tels
objets.
5.
Genèse
41.42
Le texte dit : Il (le
pharaon) retira de sa main l'anneau qu'il passa à la main de
Joseph, il le revêtit d'habits
de fin lin et lui mit au cou le collier d'or.
Le contexte littéraire montre sans
hésitation qu'il s'agit de signe indiquant l'honneur et l'autorité que le roi confère à Joseph qu'il établit dans ses nouvelles fonctions à la tête de son royaume.
Le contexte historique nous permet d'affirmer que ces
objets étaient vraiment des
objets de luxe, qu'ils avaient une fonction pratique : l'anneau devait comporter un sceau permettant de signer des documents faisant autorité; le collier avait lui aussi une fonction
symbolique d'autorité et peut-être même une signification religieuse. Daniel reçut de tels
insignes de la part de Beltshasar pour avoir expliqué l'inscription mystérieuse sur le
mur du palais et en signe des nouvelles fonctions qui lui étaient confiées (Daniel 5.7,16,29). Le roi perse Assuérus avait aussi un sceau fixé sur un anneau qu'il confiait
à ses premiers ministres pour montrer leur autorité (Esther 3.10,12; 8.2,8,10).
Mardochée, une fois promu premier ministre accepta comme Joseph de porter des
ornements liés à ses nouvelles fonctions (Esther 8.15).
Joseph accepte la fonction et ne refuse pas les bijoux utiles,
mais luxueux et compromettant qui vont avec.
Ce texte ne peut donc pas servir
à
interdire le port des bijoux.
6.
Exode 3.22;11.2,3;
12.35,36.
Le texte dit : les
Israélites ont dépouillé
les égyptiens, avec leur consentement et sous l'influence de Dieu.
Parmi les objets qu'ils ont emportés, sont mentionnés des objets d'argent et
d'or.
Le contexte littéraire fait de cet
acte un effet de la bonté de Dieu pour son peuple qu'il libère et qui reçoit
la faveur des Egyptiens.
Le contexte historique rappelle que les Israélites avaient été
esclaves et durement exploités par leurs
maîtres. Il montre que ces objets précieux ont servi :
- à la fabrication du tabernacle et de ses
ustensiles (25.3-7; 355-9,21-29). 35.22
précise que parmi ces objets il y avait des broches, des boucles, des anneaux, des
boules en
or;
- à la fabrication du
veau d'or, signe de rébellion contre le Dieu libérateur (32.3 : des
boucles d'or que les
femmes et les enfants, garçons comme filles, portaient aux
oreilles).
Rien dans ces textes n'interdit le port des bijoux. On peut
même penser que les
gens auraient mieux fait de continuer à porter leurs boucles d'oreilles que d'en faire le veau d'or. Même lorsqu'il
est fait appel à la générosité pour la construction du tabernacle et de ses ustensiles,
il n'est pas dit qu'il fallait se dépouiller par mesure éthique, de bienséance, de
simplicité et d'humilité. Et quand il y a assez pour les besoins de cette construction, aucun ordre n'est donné interdisant de garder ou de porter les bijoux qui restent encore en la
possession des Israélites.
7.
Exode 22.6
Le texte dit : quand un
homme donnera en garde à son prochain de
l'argent ou des objets...
Le contexte littéraire montre qu'il
s'agit d'une loi concernant le vol et la protection de ceux à qui quelqu'un a pu confier des objets de
valeur. Le vocabulaire utilisé indique qu'il s'agit de valeurs parmi lesquelles il peut y avoir des bijoux.
Le contexte historique permet de comprendre que cette loi était là pour remplacer la sécurité que peut offrir aujourd'hui un coffre en banque et une assurance couvrant le vol d'objets de valeur.
Cette loi implique que les Israélites peuvent posséder,
garder, et utiliser des objets de valeur, y compris des
bijoux.
8.
Nombres
31.50
Le texte dit : Nous
apportons en présent au Seigneur,
pour faire le rite d'absolution sur nos personnes devant
le Seigneur, les objets d'or, bracelets, anneaux, bagues, boucles d'oreilles et
pendentifs que chacun a trouvés.
Le contexte littéraire présente cette
partie du butin pris aux Madianites comme une offrande volontaire de la part des chefs de guerre après avoir constaté qu'aucun Israélite n'avait été tué dans cette guerre. Il explique que Moïse a
accepté cette offrande,
qu'il l'a déposée dans latente de la rencontre pour servir de mémorial atout le peuple. Cette guerre est présentée comme ordonnée par Dieu contre les
Madianites parce qu'à cause d'eux, et en particulier de leurs femmes, sous l'influence de Balaam, les
Israélites s'étaient compromis avec des cultes idolâtres et des pratiques immorales. L'ensemble du butin a dû être purifié parce que les combattants
avaient épargné des femmes et des enfants : seules les filles encore vierges ont été gardées, tous les autres humains ont été tués. Les animaux ont été partagés. Tous les objets rapportés ont du être lavés, à l'exception des métaux qui ont du être passés au feu
(31.22,23). Le texte reste imprécis : on ne sait pas si tous les bijoux d'or qui ont été offerts, et qui étaient
tous des objets travaillés (3.51) ont été passés par le feu.
Le contexte historique nous permet d'affirmer sans
hésitation que les
Madianites avaient des bijoux,
et que les Israélites ne les considéraient pas sans intérêts. Ils leur reconnaissaient une valeur marchande, ou d'échange, certainement aussi une valeur esthétique (l'auteur
remarque qu'ils étaient travaillés).
Rien dans ce texte ne permet de dire que les chefs ont fait
cette offrande de bijoux parce que les bijoux
auraient été considérés comme
impropres à l'utilisation pour les membres du peuple de
Dieu.
9.
Josué6.19,
24
Le texte dit : tout
l'argent, l'or, les objets de bronze et de fer furent consacrés au
Seigneur et placés dans
le trésor de la maison du Seigneur.
Le contexte littéraire concerne la
prise de Jéricho. L'ensemble de cette ville est vouée à l'interdit. Aucun butin ne doit être pris.
Seuls ces objets métalliques peuvent être conservés, mais pas au bénéfice des individus. Ils doivent être consacrés à Dieu.
Le contexte historique nous rappelle que les autres villes prises
par les Isarélites dans la conquête
de Canaan ont donné lieu à une prise de butin dans laquelle les individus ont eu leur part.
Des bijoux devaient faire partie de ce butin de
métaux. Rien n'est dit
qui condamnerait le port de bijoux par
les membres du peuple choisi.
10. Juges 8.24-26.
Le texte dit : les vaincus avaient des anneaux
d'or, puisque c'étaient des Ismaélites. ... ils jetèrent chacun un anneau de son butin, pour un poids total de 1700 sicles d'or, sans compter les croissants, les
pendants d'oreilles... les colliers qui étaient au cou de leurs chameaux.
Le contexte littéraire nous apprend
que, guidé par Dieu, Gédéon a délivré Israël de l'oppression des
Madianites. Gédéon refuse la proposition du peuple qui veut le faire roi. Il demande une part du butin qui a été
pris à l'ennemi. Avec cet or il va fabriquer un éphod (il est difficile de savoir ce que c'est exactement), qui deviendra une occasion d'infidélité religieuse pour la famille de Gédéon et pour une bonne partie du peuple.
Le contexte historique nous permet de savoir que les
Madianites étaient des
nomades venant du nord de la
péninsule arabique. Dans certaines parties de cette péninsule on extrayait de l'or. On en fabriquait toutes
sortes d'objets, dont des bijoux. La forme typique de certains de ces bijoux était déjà le croissant, qui reste encore aujourd'hui l'un des symboles du monde
arabe.
Ce texte ne contient aucune indication que les Israélites ne devaient pas garder les bijoux du butin pour eux, ni les porter. Au contraire chacun est invité à donner un anneau, c'est-à-dire à garder pour lui les
autres dont il s'était emparés.
11.2 Samue1.10.
Le texte dit : j'ai pris le diadème
qu'il avait sur la tête et le bracelet qu'il avait au bras.
Le contexte littéraire nous indique que
l'Amalécite qui parle à David montre ces objets qu'il a pris sur le roi
Saül qui vient de mourir.
Le contexte historique nous apprend que le diadème était considéré
comme un emblème royal ou sacerdotal.
Ce texte nous apprend que Saül, qui n'était pas un modèle de foi et de
conduite à la fin de sa vie, portait, même au combat, des insignes de sa royauté et un bijou (bracelet) qui
peut-être n'avait pas de lien avec cette fonction. Jamais Saül n'est critiqué pour son port de bijoux, ni son goût pour le luxe. Les autres rois
d'Israël et de Juda ont aussi porté des diadèmes (cf. 2 Rois 11.12, 2 Chroniques 23.11).
12. 2 Samuel 12.30 (2 Chroniques 20.2)
Le texte dit : II
enleva la couronne de leur roi de dessous sa tête ; son poids était
d'un talent d'or, avec des
pierres précieuses ; elle fut placée sur la tête de David.
Le contexte littéraire nous indique
que cette couronne a été prise sur le roi ammonite de la ville de Raba
prise par les armées de David à la fin de la campagne pendant laquelle il y a eu la
terrible faute de David avec Bath-Shéba et Urie.
Le contexte historique laisse penser que cette couronne
était
assez exceptionnelle parmi les petits
peuples de l'époque et du voisinage d'Israël. C'est la raison pour laquelle son poids est signalé ainsi que le
fait qu'elle portait des pierres précieuses.
Rien dans le texte ne laisse penser que David ne puisse porter un objet aussi inutile et
luxueux. Il est roi, il est victorieux sur ses ennemis. Il a retrouvé la paix avec Dieu après son double péché. Il ne reçoit aucun reproche pour cet acte. Au contraire, David lui-même, chantant les bienfaits de
Dieu en faveur du roi qu'il est, dit : Tu poses sur sa tête une couronne d'or (Psaume 21.9)
13. 1 Rois 10.2
Le texte dit : elle arriva
à Jérusalem... avec des chameaux chargés...
d'or en grande quantité et de pierres précieuses.
Le contexte littéraire nous permet de
savoir que cet or et ces pierres précieuses avaient été apportés à Salomon par la reine de Saba.
Le contexte historique ne nous permet pas de savoir de
façon définitive d'où
venait exactement cette
reine (Sud de la péninsule arabique ou Afrique de l'est). Ces régions sont toutes les deux
productrices d'or. Elle atteste que les sabéens, qui occupaient le sud de l'Arabie,
s'étaient beaucoup enrichis par le commerce avec les Indes.
Le roi Salomon a accepté ces présents. Il a
accumulé quantité d'autres richesses (cf. la suite de ce chapitre) qui ne sont jamais critiquées. Elles sont même attribuées à la bénédiction divine (1
Rois 3.13).
(A
suivre)